La Frondeuse de Damas en action:
Ma première randonnée en Syrie 30/11 et 01/12/2007 – Quelle aventure !
Ca y est j’ai accompli ma première randonnée en Syrie. J’avais mentionné à tous mes collègues mon intérêt pour la marche et le fait que j’étais à la recherche d’un club de randonneurs. Hasard, le lundi 26/11 ma collègue syrienne Ariane, Secrétaire de l’Ambassadeur, m’appelle. Elle a juste la visite du père jésuite hollandais Frans Vanderlucht qui organise des randonnées mais tous les deux mois seulement et toujours pour de grands groupes. Il y a une le samedi. Nous serons 200 dit-il de tout âge. Je m’inscris. Le départ a lieu le jeudi à 17h à la gare kaboun des bus hop hop. Le mercredi soir je vais à pied jusqu’au magasin Nokia acheter un nouveau GSM. L’ancien est tombé en panne et est irréparable. J’estime qu’un GSM est nécessaire quand on part en excursion. Le magasin se trouve sur « l’autostrade » de Mezzeh et c’est une bonne préparation physique à la promenade car il est fort loin, ce dont je ne me doutais pas. Je commençais à désespérer de le trouver. Evidemment j’oublierai le GSM à la maison le lendemain ! Ariane m’inscrit le nom de la gare en arabe pour le taxi. Je suis quelque peu désorganisée car je prépare mon sac le jeudi matin seulement et j’oublie le billet en arabe de ma collègue à la maison. Je ne trouve pas mon sac de couchage, mais le père Vanderlucht, contacté, me rassure on me donnera des couvertures et il me promet un lit. Je ne mourrai pas de froid. Je pensais aller au rendez-vous directement du bureau. Après le boulot je suis prise de paresse et hésite. Je dois d’abord passer à la maison pour le billet en arabe. Je n’ai aucune idée où se trouve cette gare des bus hop hop (nom amusant). J’espère secrètement arriver en retard ! La gare n’est pas près de la porte, néanmoins je suis bien à temps. Attendent déjà deux Hollandais et un Espagnol. Les étrangers sont à l’heure, les Syriens seront en retard. C’est normal. Le lieu du rendez-vous est l’entrée de la gare où on fouille les sacs. Je pense que je dois montrer le mien aussi mais les étrangers ne sont pas fouillés ? Impensable qu’ils soient des terroristes ? On voit évidemment directement que je ne suis pas syrienne bien que l’on trouve aussi des blonds, roux, etc. parmi la population locale. Nous attendons, attendons à l’intérieur, personne d’autre n’arrive. Un des Hollandais repère des sacs à dos à l’extérieur juste à côté de la porte et part s’informer. Oui, il s’agit de notre groupe. Le bus est parqué plus loin dans la rue. On inscrit tout le monde et nous partons à 18h. Il nous faudra 4h pour arriver avec un arrêt d’une 1/2h à mi-chemin pour un thé, une collation, etc. Nous logeons dans un lieu religieux chaldéen, un grand bâtiment, un monastère ? Un des randonneurs m’a expliqué que le lieu est vide en hiver mais fort utilisé en été. Je reçois une chambre qui compte deux lits, ainsi que les deux couvertures promises. L’électricité ne fonctionne plus dans cette chambre, heureusement il y a la lumière du couloir. En hiver il fait déjà noir à 17h30. Nous sommes tellement nombreux que tout le monde ne peut avoir de chambre, des matelas sont disposés dans toutes les espaces disponibles. Le soir, encore frais et dispos, les jeunes et moins jeunes se lancent dans la danse. A minuit je ne tiens plus le coup et vais dormir. La fête dure jusqu’une heure du matin. J’entends la musique plus les voix dans le couloir.
Le lendemain, samedi 30/11 réveil à 7h au son d’un sifflet. J’ai deux voisines, une mère et sa fille dorment dans le deuxième lit. Elles parlent français. La fille a épousé un Français rencontré lors d’une randonnée précédente. Réunion dans la chapelle. On forme des groupes de 9-10 personnes. Ce sont les groupes repas. Chaque groupe prendra tous ces repas ensemble durant le week-end. Je fais partie du groupe 5 composé uniquement de Syriens dont certains parlent -ouf- anglais. Petit déjeuner frugal : du thé sucré, du pain arabe, et divers plats contenant de la confiture, des olives, du fromage et un autre mélange brun/noir avec des grains pas mauvais du tout mais que je ne peux identifier. Le pain sert de fourchette/cuiller/couteau. On le déchire en morceaux pour plonger dans les plats. Chaque groupe essaie, si possible, de trouver une table pour manger. Les groupes sont si nombreux que cela ne réussit pas toujours, certains s’asseyent sur les matelas par terre avec les plats par terre également.
8h30 départ. Le ciel est couvert et un vent glacial souffle à profusion. Heureusement en marchant on se réchauffe rapidement. Après quelques kms sur une route nous nous lançons sur les pistes et dans les broussailles. Le terrain est assez accidenté, en pente et plein de rochers et de rocailles. Nous nous égratignons à qui mieux mieux. Une belle ronce me balafre la cuisse et déchire mon pantalon. C’est une descente assez mouvementée. Pourquoi nous obstinons-nous toujours à descendre pour remonter après ? Puf, puf ! Je bavarde avec divers participants. Plusieurs d’entre eux parlent même français. Nous arrivons dans la vallée et c’est la pause-déjeuner qui a lieu en plein air près d’une source d’eau fraîche. Le groupe 5 se rassemble et essaie de trouver –en vain- un endroit à l’abri du vent glacial. Nous nous sustentons balayés par les rafales glaciaires. Assis sur des escaliers près du point d’eau nous mangeons des œufs durs, des patates et des tomates accompagnés de pain arabe qui, comme pour le petit déjeuner, sert de fourchette/cuiller/couteau. Le dessert : de délicieuses mandarines. Le père Franz Vanderlucht me demande si je continue la randonnée ou si je veux retourner avec la camionnette qui a apporté le déjeuner. Je continue bien sûr. Cette étape sera légèrement plus courte que celle que nous venons de faire dit-il. Une bonne grimpette nous attend. Le groupe s’effiloche en plusieurs entités, suivant le rythme des diverses personnes. Arrivés au sommet du mont, nous ne voyons plus les premiers marcheurs, aucune indication de la route à suivre que personne parmi nous ne connaiî. Malgré des contacts GSM nous restons dans l’ignorance. Peu à peu le soir commence à tomber. Le groupe, dans lequel je me trouve, décide de retourner sur ses pas car il commence à faire noir et c’est risqué de continuer. Je n’ai qu’une seule crainte : être la dernière, perdre les autres et me retrouver seule dans le noir perdue dans un pays dont je ne connais pas la langue. De plus je ne sais même pas le nom de l’endroit où nous logeons. J’exprime mon angoisse et deux couples très gentils me prennent sous leur houlette et veillent à ce que je reste parmi eux. Les Syriens que j’ai rencontrés durant ce week-end étaient tous super gentils. J’ai aussi rencontré un Egyptien très aimable. Il est ici et suis une formation de jésuite dans le centre du père Frans. Une bonne partie de la descente sur un sol rocailleux se fera dans le noir. Seuls quelques participants ont des lampes de poche. Nous pensons retourner sur nos pas mais nous nous perdons et nous nous retrouvons dans une localité inconnue. Youpie nous repérons un restaurant où nous pourrons demander le chemin et où les dames pourront profiter du petit coin. Erreur, il s’agit d’une maison privée mais ils peuvent évidement nous renseigner et très aimablement permettent aux dames d’utiliser les commodités. Le « monastère » chaldéen se trouve encore à 2h15 de marche. La moitié du groupe, dont moi, décide de prendre le bus et les autres continuent à pied. Nous arrivons vers 19h00. Les derniers marcheurs arriveront vers 21h00. Heureusement que nous avons décidé de revenir sur nos pas car José, l’Espagnol, me raconte ses périples. Lui aussi s’est retrouvé au sein d’un petit groupe ayant perdu le père Frans -le guide- de vue, mais heureusement ils connaissaient le chemin. Comme moi José a craint de se retrouver tout seul et il les a suivi. Il me raconte que ce fut très dur, une descente assez forte dans les broussailles et les rochers suivie d’une montée dans les mêmes conditions et tout cela DANS L’OBSCURITÉ !! C’était dangereux et fatiguant. Il est crevé. Jamsa, jamsa (cinq, cinq) le souper est servi : une délicieuse soupe nourrissante avec l’inévitable pain arabe. Tout le monde n’est pas aussi fatigué que moi, des bouteilles de vin apparaissent sur les tables, de la musique s’improvise, des mains tapent en rythme sur les tables, des chants résonnent, et les danseurs s’élancent. Très chouette ambiance. Néanmoins je ne résiste pas longtemps et part m’écrouler dans mon lit.
Le lendemain je me réveille à 7h comme le jour précédent Pas un chat dans les couloirs. Rien ne bouge. Pas d’eau, elle est coupée. Vers 8h on entend quelques bruits. Je rencontre le père Franz qui annonce qui tout est retardé à cause du manque d’eau, impossible de préparer le thé du petit déjeuner. Une réunion d’évaluation est organisée dans la chapelle. Après tout un speech, le père nous invite – les deux Hollandais, José et moi, à partager nos impressions du premier jour avec les autres. Zut, je n’aime pas trop parler en public et espère y échapper mais, après les deux Hollandais et l’Espagnol, il m’invite carrément à venir sur la scène. Mon discours est bref mais néanmoins apprécié. Tout le monde nous applaudit. Petit déjeuner identique au jour précédent et départ pour une randonnée plus courte que prévue à cause du retard. Nous marcherons deux heures seulement. Nous avons de la chance, le vent est tombé et le soleil est radieux. La promenade est magnifique. Elle nous emmène dans une vallée où coule un ruisseau que nous longeons. Partout de la verdure et des arbres aux tons automnaux. Evidemment, comme toujours il faut descendre puis remonter. La montée est assez raide et longue. Les paysages sont fort beaux. Je suis enchantée de la ballade.
Le même soir, j’ai des tickets à Dar El Assad pour un concert d’un groupe vocal tchèque (nostalgie, nostalgie quand tu nous tiens) Pas de problèmes, en principe, car le départ du bus est prévu à 15h00. Mais nous sommes en Syrie. Des groupes de diverses villes ont participé à la randonnée : Homs, Alep et Damas. Un bus arrive en effet à 15h mais c’est celui pour Alep. Nous devons patienter. Un deuxième bus arrive plus tard mais il est pour Homs. Un troisième bus arrive et il est aussi pour Homs. Chaque fois qu’un bus arrive je saute de joie, enfin, pour avoir une désillusion aussitôt. Ce n’est pas encore notre bus. Finalement le bus pour Damas partira à 18h20 ! Les Syriens font preuve d’une patience infinie. Est-ce leur caractère ou sont-ils accoutumés à ce genre de délai ? Je pense que cela doit arriver régulièrement et qu’ils sont habitués. De toute façon leur rapport au temps est différent du nôtre. Le soir est tombé et il commence à faire froid. Un feu est improvisé à l’extérieur. Nous nous regroupons autour. Un blagueur raconte des histoires drôles, perdues pour moi, car en arabe. Un autre groupe est réuni à l’intérieur et bavarde aussi allègrement. Je les rejoins et emmitouflée dans une couverture écoute la traduction que Malik gentiment effectue à mon intention. Il m’explique que le chauffeur du bus contacté a probablement trouvé un boulot plus intéressant et a envoyé un autre bus qui, comme nous le jour antérieur, s’est perdu. Nous arriverons 3h30 plus tard à Damas, à 21h30. Pas d’arrêt pipi cette fois-ci sauf pour ces messieurs. Les femmes sont toujours discriminées.
José et moi râlons à qui mieux mieux sur l’organisation de la randonnée pour finalement, le lendemain, nous sentir enchantés du week-end.
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